Pépites de managementRetrouvez ici quelques pépites issues de notre veille des meilleures publications sur le leadership et le management
Incertitude

Méfiez-vous des informations qui confirment ce que vous pensez
La période actuelle met à rude épreuve notre relation au vrai. Comment nous faire un avis fondé ? Certes, notre faculté de raisonnement a toujours été perturbée par d’innombrables biais cognitifs. Mais, avec l’essor d’Internet, nous nous sommes trouvés noyés sous une surabondance d’informations. Plus récemment, nous découvrons que nous sommes manipulés par des actions organisées de désinformation. De plus, savoir garder le recul adéquat sur les affirmations des IA génératives est un exercice nouveau, que nous sommes encore loin de toujours maîtriser.
Le sociologue Gérald Bronner propose une prise de hauteur salutaire à l’occasion d’un cycle de conférences sur l’esprit critique à la Sorbonne. On a longtemps considéré que la rationalité et la vérité finissent toujours par s’imposer. On découvre aujourd’hui que cela n’a rien d’évident. Plus les informations sont nombreuses, plus nous tendons à sélectionner celles qui vont dans le sens de ce que nous croyons déjà. Et l’énorme volume d’informations disponibles aujourd’hui permet presque toujours d’en trouver certaines qui soutiendront nos théories – quitte à tordre un peu le raisonnement. D’où l’importance de cultiver un sain scepticisme en nous obligeant à passer par une phase de questionnement lorsqu’une information confirme nos croyances. Nous pouvons aussi développer notre aptitude à la métacognition, c’est-à-dire la capacité non seulement de raisonner, mais aussi de comprendre, d’évaluer et de critiquer la façon dont nous raisonnons.
Tout un programme, à mettre entre toutes les mains !
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Source : Développer son esprit critique face au monde de la désinformation, conférence de Gérald Bronner, Faculté des Lettres de Sorbonne Université, YouTube, février 2025.
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Où est le vrai ?
C’est peu de dire que l’exercice du leadership s’est compliqué ces dernières années. Incertitude, complexité croissante, rythme accéléré… la littérature détaillant ces difficultés abonde.
Parmi ces enjeux, l’un d’entre eux est souvent sous-estimé : il est de plus en plus difficile de distinguer le vrai du faux, et de parvenir à une vision partagée de ce qui constitue la réalité. On a pensé trouver la solution dans le management par les données, en créant des tableaux de bord incontestables. Aujourd’hui, on constate que la multiplication des données chiffrées – dont on finit par perdre le sens tant les sources sont variées et les modes de calcul complexes – a créé plus de confusion que de clarification.
Alors, que faire face à des perceptions multiples ? Avant tout, se rappeler que l’on n’est jamais totalement objectif – et poser des questions pour affiner la façon d’appréhender le sujet. Quelles sont les sources des données et comment ont-elles été validées ? Quels ont été les critères de sélection, les choix faits pour l’analyse ? Tout leader doit ainsi aujourd’hui adopter une démarche scientifique, en considérant ses premières conclusions comme des hypothèses à valider ou à étayer.
Source : Four Leadership Loads That Keep Getting Heavier, Melissa Swift, MIT Sloan Management Review, décembre 2024.
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Comment s’adapter au retour des tensions géopolitiques ?
Parmi les défis qui guettent les dirigeants – généralisation de l’IA, guerre des talents, changement climatique –, quelle place réserver à la géopolitique ? Selon Nikolaus S. Lang, directeur monde du BCG Henderson Institute, il s’agit d’un enjeu encore largement sous-estimé par les entreprises. Dans un TED instructif, il exhorte les dirigeants à se préparer à l’avènement d’un monde multipolaire, avec, entre autres, les recommandations suivantes :
- Renforcer la résilience de sa chaîne d’approvisionnement. Les chaînes d’approvisionnement globales sont devenues vulnérables face au risque accru de barrières tarifaires, de sanctions économiques ou de guerre. Mieux vaut travailler à la flexibilité de cette chaîne, en réduisant sa dépendance à l’égard d’un site en particulier et en identifiant les alternatives possibles.
- Renforcer son « intelligence géopolitique ». Pour faire face aux revirements géopolitiques, les entreprises doivent renforcer leur aptitude interne, en habituant les équipes à travailler selon différents scénarios, et en recrutant des talents capables d’anticiper ces enjeux et de s’y adapter.
Source : 5 ways leaders can adapt to shifting geopolitics,Nikolaus S. Lang, TED@BCG, septembre 2024.
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« C’était mieux avant »… Vraiment ?
On entend fréquemment ce refrain nostalgique : « On ne peut plus se faire confiance comme par le passé ; les gens sont de plus en plus individualistes ; l’incivilité et la violence augmentent… » À l’écouter, notre société serait confrontée à une forme de déclin moral.
Les psychologues Adam Mastroianni et Daniel Gilbert ont passé en revue plusieurs centaines d’études pour analyser ce phénomène inquiétant. Ils ont découvert que ce mythe du « déclin moral » est en fait omniprésent depuis l’Antiquité. Parallèlement, l’étude des comportements réels montre, au pire, une stabilité, et le plus souvent une progression des comportements positifs. Nous sommes moins souvent en guerre, les règles et les lois encadrent mieux les relations et renforcent la confiance, nous continuons à nous entraider…
Pourquoi notre perception diffère-t-elle tant de la réalité ? Deux biais cognitifs sont en cause : le biais de négativité et le biais de mémoire. Notre cerveau donne plus d’importance aux informations négatives, ce qui constitue à l’origine un réflexe de protection. D’autre part, nos souvenirs négatifs s’estompent plus vite que nos souvenirs positifs, ce qui nous permet de mettre à distance les expériences négatives, mais peut aussi nous conduire à idéaliser le passé.
Ainsi, nous ne pouvons pas nous empêcher de penser, souvent à tort, que c’était mieux avant. Mais savoir pourquoi nous avons cette perception biaisée peut nous aider à la relativiser.
Source : Déclin moral : pourquoi pense-t-on toujours que « c’était mieux avant » ?, Adam Mastroianni, Polytechnique Insights, novembre 2023.
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Savoir quand revenir à un mode décisionnel plus intuitif
C’est un fait admis : pour prendre une décision de qualité, mieux vaut collecter un maximum d’informations et les analyser avec soin. Mais est-ce toujours vrai ?
Plusieurs travaux de recherche invitent à nuancer cette conviction. Ils mettent en évidence que dans certains contextes, on gagne à s’affranchir d’une analyse poussée de la situation. Mieux vaut alors se contenter de décider en se basant sur des critères simples, tels que des règles empiriques fondées sur des expériences passées. Cela s’observe dans trois cas de figure :
– Un contexte incertain, saturé en informations : lorsque des données et des analyses multiples sont disponibles et que l’état de l’art ne permet pas de trancher sur des bases solides, ajouter encore plus d’informations et d’analyses ne fait qu’augmenter la charge cognitive, sans pour autant clarifier la décision à prendre.
– Un environnement fluctuant : sur les marchés en évolution rapide, les données sont parfois obsolètes avant même que l’on ait eu le temps de les collecter et de les traiter.
– Une difficulté d’accès à l’information : parfois, le coût nécessaire pour collecter de l’information en quantité et en qualité suffisantes n’est pas justifié par le potentiel de gain lié à une décision mieux informée.
Dans de telles circonstances, la qualité des décisions prises repose moins sur la finesse et l’exhaustivité des analyses que sur la capacité à mobiliser son expérience ou celle de ses experts. Une découverte contre-intuitive à l’heure du Big Data !
Source : The Potency of Shortcuts in Decision-Making, Sebastian Kruse, David Bendig, Malte Brettel, MIT Sloan Management Review, septembre 2023.
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